Après la remise en cause par Holcim de sa fusion imminente avec Lafarge, les conseils d’administration des deux cimentiers se sont réunis en urgence hier après-midi pour se concerter. Objectif : trouver un terrain d’entente le plus vite possible. Il n’y a pas que pour eux que cela urge, comme va l’illustrer l’assemblée générale un peu spéciale prévue demain.
Le cimentier irlandais CRH se réjouissait d’avoir remporté, pour 6,5 milliards d’euros, les actifs à céder dans le cadre de la fusion de Lafarge et d’Holcim. Mais cette acquisition étant conditionnée à la fusion, l’aubaine tourne au cauchemar. L’assemblée générale de CRH destinée à approuver la transaction a été convoquée de longue date et doit se tenir demain. Pis : le groupe irlandais a déjà réalisé, le 5 février, l’augmentation de capital de 1,6 milliard d’euros devant financer en partie cet achat exceptionnel. Cela représente tout de même quasiment 10 % de son capital… Pas étonnant que le cafouillage de la fusion ait fait chuter son cours de Bourse de 4,7 % lundi et à nouveau de 3,28 % hier. Les 150 millions d’euros d’indemnités auxquels il aura droit si la fusion ne se fait pas sont une maigre consolation.
Mais le marché croit-il encore à la fusion d’Holcim avec Lafarge ? les cours de Bourse des deux groupes ont poursuivi leur baisse hier (-1,93 % pour Holcim et -2,45 % pour Lafarge) et commencent à diverger des parités de fusion évoquées, que ce soit celle convenue à l’origine ou celle réclamée maintenant par le cimentier suisse. Ce dernier estime qu’un titre Lafarge ne vaut plus un titre de l’ensemble fusionné (le Holcim post-fusion) mais seulement 0,875 titre, et la Bourse lui avait donné raison lundi. Les cours de clôture faisaient ressortir une parité de 0,872. Mais la clôture d’hier donne une parité de 0,867. Mieux que les rêves les plus fous d’Holcim.
Possible changement de gouvernance
Reste les attentes d’Holcim. Le PDG de Lafarge, Bruno Lafont, sera-t-il sacrifié sur l’autel de la fusion qu’il a orchestrée ? Après le courrier très succinct envoyé par le Suisse au Français dimanche, les deux cimentiers ont commencé à échanger et Lafarge doit évaluer les concessions pouvant être faites à Holcim, dont les actionnaires demandent à la fois une révision de la parité de fusion et un changement de gouvernance par rapport à l’accord de rapprochement entériné en juillet 2014. Au-delà des problèmes de personne amenant Holcim à vouloir la tête du directeur général prévu pour le nouvel ensemble, Bruno Lafont, le Suisse se défend aujourd’hui de vouloir davantage de pouvoir dans la future gouvernance. En clair, de revenir sur la parité au conseil d’administration où le directeur général doit être administrateur. Holcim serait donc prêt à ce que Lafarge choisisse le directeur général qui serait recruté en externe.
M. C.
Source : CRH pris dans le cafouillage de la fusion Lafarge-Holcim