À croissance molle, trafic en baisse pour 2014. Mais la grande région peut changer la donne de l’investissement.
Les ports sont des thermomètres de l’activité économique. Il n’y aura donc pas eu de miracle en 2014 du point de vue du trafic des grands ports de la façade maritime atlantique. Nantes-Saint-Nazaire, de loin le plus important avec 26 millions de tonnes de trafic, a baissé de 4 %, La Rochelle de 3 %. Bordeaux, qui n’a pas publié ses chiffres, devrait repasser à nouveau sous la barre des 9 millions de tonnes (-5 %), seuil qu’il avait dépassé l’an passé pour la première fois depuis treize ans. Seul le port de Bayonne a maintenu son trafic, avec 2,6 millions de tonnes l’an passé. Et il investit 13 millions d’euros dans une drague qui devrait renforcer sa compétitivité.
Depuis quelques années toutefois, l’élan portuaire est clairement rochelais : « Nous avions connu une hausse de 16 % de nos échanges en 2013 », a opportunément rappelé vendredi soir Michel Puyrazat, le président du directoire du Grand Port maritime de La Rochelle. Ce dernier est passé, en moins de dix ans, de 7 à 9,3 millions (en 2014). Et il maintient fièrement son objectif de 10 millions de tonnes d’ici à 2016.
Céréales à La Rochelle
Les atouts rochelais sont connus. Port en eau profonde, accessible par toutes conditions de marée, il s’est imposé, en multipliant les investissements publics et privés, comme un grand port de vrac pour les céréales, qui représentent aujourd’hui la moitié de son trafic, les produits pétroliers, ceux issus de la forêt et de l’agriculture. Soutenu par les grandes collectivités de la région Poitou-Charentes, il a aussi développé de manière significative le transport multimodal. Plus de 14 % des marchandises transitant par le port rochelais utilisent le rail grâce, notamment, à la montée en puissance de l’opérateur ferroviaire portuaire (OFP) Atlantique. « La Rochelle est un hub logistique d’assemblage », précise Xavier Beulin, le président du conseil de surveillance du Port de La Rochelle.
Mais la qualité logistique d’une place portuaire dépend de ses infrastructures. Le port de La Rochelle table sur environ 50 millions d’euros d’investissements publics (Anse Saint-Marc, électrification, rénovation ferroviaire…) dans le cadre du prochain contrat de projet État-Région, probablement signé à Poitiers au printemps prochain. « Il a déjà un an de retard et nous serons vigilants quant à son application », confie, un brin inquiet, Xavier Beulin.
Changement de cadre
Négocié au nord, ce contrat sera exécuté dans le cadre de la future grande région, donc plus au sud, à compter du 1er janvier 2016. Un nouveau cadre qui pourrait changer la donne : « Les ports de Bordeaux et de La Rochelle ont des profils voisins, et il nous faudra demain trouver avec les acteurs de nouvelles complémentarités », avance Bernard Uthurry, le vice-président du Conseil régional Aquitaine, chargé des infrastructures. Il apparaît aujourd’hui clair – et les ports ne sont pas les seuls concernés – que des avenants à ces contrats seront signés par la majorité du futur conseil de la grande région.
Le Port de Bordeaux le sait. Aussi avance-t-il ses pions. Bien doté en crédits publics pour la prochaine mandature, il affiche un potentiel d’investissement de l’ordre de 80 millions d’euros. Dès l’automne 2015, la société Europorte exploitera le teminal à conteneurs du Verdon. Les travaux pour son terminal à granulats à Grattequina vont se poursuivre. L’activité répararation (refit) et maintenance de navires s’est donné un avenir. L’activité de croisières est elle aussi en développement. « Et nous disposons du foncier nécessaire à notre développement », aime à rappeler Christophe Masson, le patron du Port de Bordeaux.
Il n’y aura sans doute pas de guerre des ports dans la future grande région, mais une probable concurrence dans l’accès aux crédits publics. L’élargissement du spectre va amener de nombreuses politiques régionales à être repensées sur fond de restrictions budgétaires persistantes. Un bel enjeu de campagne électorale.
Par Jean-Bernard Gilles
Source : Ports de commerce : les sites atlantiques en retrait – SudOuest.fr